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Perspectives de 2024 pour le secteur laitier : retour à un sentiment de normalité

7 févr. 2024
6,5 min de lecture

La demande plus forte des transformateurs et les stocks de beurre qui demeurent bas préparent le terrain pour de nouvelles hausses de la production laitière canadienne en 2024. Ces facteurs, combinés à la vigueur des prix des vaches et veaux de réforme et à la stabilisation des coûts des intrants – qui demeurent toutefois encore élevés – forment le contexte de nos estimations des marges brutes moyennes pour 2024, qui ont meilleure allure que celles des dernières années (figure 1).  

Figure 1. Estimations des marges brutes moyennes des produits laitiers ($/hl), 2019-2024 

*La marge brute est le revenu total moins les coûts variables totaux (y compris l’alimentation animale). Les coûts fixes et la rémunération pour la gestion sont exclus du calcul. Nous n’avons pas inclus les coûts fixes, car ils varient considérablement d’une exploitation à l’autre.

**Comme les calculs reposent sur des définitions différentes des catégories de coûts pour le P5 et la MCLO, les valeurs ne sont pas directement comparables.

Sources : Statistique Canada, Commission canadienne du lait, gouvernement de l’Alberta, Services économiques FAC

En décembre 2023, l’organisation responsable de l’Entente sur la mise en commun du lait de l’Ouest (MCLO) a annoncé qu’à compter du 1er février 2024, des augmentations des quotas entreraient en vigueur. Les augmentations n’ont pas été réparties uniformément entre les provinces (voir le tableau 1) en raison d’un effort de « rééquilibrage » visant à garantir que les quatre provinces qui font partie de la MCLO soient sur un pied d’égalité. Aucune augmentation n’a été annoncée dans l’Est du Canada (soit par le P5) pour l’instant. 

 Tableau 1. Augmentations de quotas de la MCLO par province  

Province 

Hausses de quotas (%) 

Manitoba 

1,50 % 

Saskatchewan 

2,00 % 

Alberta 

2,25 % 

Colombie-Britannique 

3,00 % 

 Source : BC Milk   

De plus, une hausse de 1,8 % du prix du lait à la ferme entrera en vigueur le 1er mai  2024. Vu l’augmentation de la production et les prix à la ferme légèrement plus élevés, on prévoit que les recettes monétaires agricoles totales du secteur laitier augmenteront de 3,7 % cette année. La vigueur soutenue des prix des vaches et jeunes taureaux de réforme en  2024 donneront un coup de pouce supplémentaire à la rentabilité.   

Tendances à surveiller en 2024  

Voici les principales tendances économiques susceptibles d’influer sur les exploitations laitières en 2024 : 

  • Prix et disponibilité des aliments pour animaux 

  • Stocks de beurre 

  • Demande et inflation dans le commerce de détail 

Obtenez les perspectives économiques de FAC pour 2024 pour le secteur laitier

Produits laitiers : Perspectives économiques de FAC pour 2024 

Prix et disponibilité des aliments pour animaux 

Les prix et la disponibilité des aliments pour animaux seront les facteurs déterminants de la rentabilité en 2024. La récolte record de 2023 aux États-Unis a fait chuter les prix du maïs, qui ont atteint un creux inégalé en trois ans, allégeant le fardeau que représentent les coûts de l’alimentation animale pour les producteurs, particulièrement dans l’Est. Comme le maïs est la référence d’autres marchés de céréales fourragères, le blé et l’orge fourragers ont aussi subi une pression baissière, même dans les régions où la sécheresse a limité la production de blé et d’orge. Des importations de maïs quasi record des États-Unis en 2023 permettent également de contenir les prix de l’alimentation animale dans l’Ouest, qui demeurent tout de même élevés. Les Services économiques FAC prévoient que les coûts des aliments pour animaux seront moins importants en 2024, mais suivront une tendance à la hausse tout au long de l’année.  

Il ne faut pas oublier que le coût de l’alimentation animale est un coût d’opportunité. Pour les exploitations agricoles qui cultivent elles-mêmes la totalité ou une partie des aliments qu’elles donnent à leurs animaux, ce coût sera probablement inférieur aux chiffres indiqués ci-dessous.  

Figure 2. Les coûts de l’alimentation animale devraient baisser davantage en 2024  

Sources : Statistique Canada, Services économiques FAC

Les prix du foin sont plus stables dans l’Ouest et le resteront, reflétant davantage la dynamique du marché local et la pénurie de produits. Les producteurs espèrent de bonnes conditions d’humidité au printemps et une première coupe abondante. 

On recommande à chaque producteur de comprendre la structure des coûts de production de son exploitation et de déterminer des stratégies de gestion visant à réduire le plus possible les risques en fonction de différents scénarios de production ou de prix pour l’alimentation animale. 

Stocks de beurre 

Comme c’était le cas dans les perspectives des produits laitiers en 2023, les niveaux de stocks de beurre sont une tendance à surveiller cette année. Les stocks de beurre sont plus élevés qu’à pareille date l’an dernier, mais ils restent bas en comparaison des dernières années (figure 3).  

 Figure 3. Les stocks de beurre demeurent bas au début de 2024 

Source : Commission canadienne du lait

Les faibles stocks de beurre laissent peu de place à l’erreur, si jamais la production n’arrivait pas à répondre à la demande prévue, et ils constituent une des principales raisons pour lesquelles des journées d’incitatifs supplémentaires pourraient être annoncées pour les producteurs du P5. Une journée d’incitatifs a déjà été annoncée pour février en raison de « la demande du marché plus forte que d’habitude au début de 2024 ». L’an dernier, il y a eu six journées d’incitatifs dans le P5 pendant que les stocks de beurre avoisinaient des planchers historiques.  

Demande et inflation dans le commerce de détail 

La demande de produits laitiers continue d’évoluer, mais elle semble se maintenir relativement bien malgré le resserrement du budget des consommateurs. L’une des raisons est que les prix des produits laitiers ont moins monté en 2023 que ceux de bon nombre d’autres denrées alimentaires importantes (figure 4).  

Figure 4. La hausse de prix a été moins forte pour le lait et le fromage que pour la plupart des autres principales catégories alimentaires en 2023 

Source : Statistique Canada

Le Rapport sur les prix alimentaires au Canada 2024 prévoit, en 2024, une hausse variant de 1 à 3 % du prix des produits laitiers, qui se trouvent à égalité avec les fruits pour ce qui est du taux d’inflation projeté le plus bas parmi les principales catégories d’aliments. Si ces prévisions se concrétisent, les produits laitiers bénéficieront d’un avantage de prix (relatif) à l’épicerie, à l’heure où les consommateurs font face à des pressions extrêmes. La croissance démographique est un autre moteur de la demande; elle contribue à augmenter les ventes lorsque la consommation d’aliments par habitant diminue.  

La demande constante de produits laitiers se constate également dans d’autres données. Chaque mois, la Commission canadienne du lait (CCL) estime les besoins totaux, qui représentent une mesure de la quantité de matière grasse butyrique que nécessitent les transformateurs canadiens. La CCL estime que les besoins totaux ont grimpé de 2,4 % en 2023 et que la hausse des quotas de la MCLO s’explique par l’augmentation prévue de la demande des transformateurs (autrement dit, les besoins totaux) en 2024.  

En conclusion 

Les producteurs laitiers ont connu quelques années de volatilité, mais 2024 s’annonce plus calme – c’est le signe d’un retour à un environnement plus normal, en quelque sorte. Les baisses de taux d’intérêt prévues dans la deuxième moitié de l’année offriront un peu plus de répit aux producteurs. La rentabilité des producteurs de l’Ouest dépendra en fin de compte du déroulement de la saison de croissance dans les Prairies.  

x.com/Graeme_Crosbie
Graeme Crosbie

Économiste principal

Graeme Crosbie est économiste principal à FAC. Ses domaines d’intérêt portent notamment sur l’analyse et les perspectives macroéconomiques et sur l’analyse et la surveillance de l’industrie agroalimentaire canadienne. Ayant grandi sur une ferme laitière dans le sud de la Saskatchewan, il formule à l’occasion des observations sur la santé de l’industrie laitière du Canada.

Graeme est employé à FAC depuis 2013 et a consacré la plus grande partie de ces années à la gestion du risque. Il détient une maîtrise en gestion avec spécialisation en économie financière de l’Université de Cardiff ainsi que le titre d’analyste financier agréé (CFA).