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Perspectives préliminaires : les pressions possibles sur les coûts en 2026 renforcent la volonté de réaliser des gains d’efficience

10 sept. 2025
9 min de lecture
Une agricultrice monte sur le réservoir d'un semoir pneumatique

Même si la récolte est loin d’être terminée dans tout le pays, il n’est pas trop tôt pour commencer à penser à la rentabilité pour l’année prochaine. Les prix et les dépenses sont toujours au centre des préoccupations des agriculteurs et agricultrices. Si les coûts des intrants ont diminué par rapport au sommet atteint en 2022, ils restent toutefois élevés et affichent une fois de plus une tendance à la hausse. Contrairement à 2022, lorsque la hausse des coûts des intrants de culture a été compensée par la vigueur des prix des produits agricoles, l’année 2026 s’annonce bien différente. Le prix des cultures devrait évoluer en sens inverse, ce qui comprimera les marges et aura une incidence sur la productivité. Cette pression est aggravée par les perturbations du commerce mondial, notamment les tarifs douaniers imposés par la Chine sur le canola et les pois canadiens.

Les marges étant sous pression, la gestion des coûts est donc plus importante que jamais. Même si les enjeux commerciaux et géopolitiques échappent en grande partie à notre contrôle, il peut être utile de mettre l’accent sur les facteurs qui sont à notre portée. Des aides à la prise de décisions, des conseils agronomiques et d’autres services de soutien à valeur ajoutée de la part des fournisseurs d’intrants peuvent aider les producteurs et productrices à prendre de meilleures décisions, à améliorer leur efficience et à augmenter leurs revenus.

Voici notre premier aperçu des facteurs qui auront une incidence sur le marché des intrants de culture en 2026. Cet aperçu vise à aider les agriculteurs et agricultrices à planifier la prochaine année.

Les coûts des intrants de culture devraient encore augmenter en 2026

Au Canada, les agriculteurs et agricultrices devraient consacrer 22,5 milliards de dollars aux intrants de culture en 2026 (figure 1). Cela pourrait faire de 2026 l’une des campagnes agricoles les plus coûteuses, rivalisant potentiellement avec le record établi en 2022. Les dépenses en produits chimiques et en semences augmentent en raison des pressions inflationnistes. Le carburant est la seule dépense qui devrait diminuer. Toutefois, l’engrais, qui est la catégorie de dépenses la plus importante et constitue l’objet de notre analyse, devrait atteindre près de 10 milliards de dollars en raison des prix élevés.

Figure 1 : Les dépenses en intrants de culture canadiens devraient demeurer élevées en 2026

Diagramme à barres empilées montrant les dépenses totales d’intrants de culture au Canada de 2021 à 2025, avec des prévisions pour 2026. Il présente une ventilation des coûts des engrais, des produits chimiques agricoles, des semences et du carburant.

Sources : Statistique Canada et Services économiques FAC

Les prix des engrais sont demeurés élevés

Les prix des engrais ont grimpé au cours de l’été, même si c’est habituellement une période tranquille où les prix ont tendance à chuter. Le coût de l’engrais azoté est resté élevé partout en Amérique du Nord, car les agriculteurs et agricultrices aux États-Unis ont ensemencé une bien plus grande quantité de maïs, estimée à 97,3 millions d’acres, soit une hausse de 7,4 % par rapport à l’an dernier. Cette augmentation a entraîné une hausse de la demande d’azote, en particulier pour l’épandage de couverture effectué en été.

Sur le marché mondial, la forte demande a également permis à l’azote de pénétrer d’autres marchés, y compris l’Europe. Le prix du phosphate demeure élevé en raison de l’insuffisance de l’offre mondiale. L’Inde a été à l’origine d’une grande partie de la demande estivale d’urée et de phosphate.

En revanche, au Canada, le prix élevé des engrais a maintenu la demande estivale à un faible niveau. Bon nombre de propriétaires d’exploitations agricoles ont retardé leurs achats pour l’année prochaine, préférant adopter une approche attentiste dans un contexte d’incertitude du marché. Les programmes d’achat d’engrais des détaillants ont été peu sollicités cet été en raison des incitatifs de prix limités. Comme la demande mondiale reste forte et que l’offre est limitée, le coût des engrais risque de demeurer élevé, tandis que le prix des cultures devrait diminuer, ce qui exercera une pression accrue sur les marges des exploitations agricoles.

L’augmentation de la production pourrait exercer une pression sur le prix des cultures

Aux États-Unis, les producteurs et productrices agricoles sont en passe d’obtenir une récolte de maïs sans précédent cette année, grâce à des rendements records et à l’expansion des superficies cultivées. Malgré l’amélioration des prix des céréales et des oléagineux au début de l’été, l’augmentation de la production, ainsi que la perte de possibilités d’exportation de canola et de pois canadiens vers la Chine, et l’impact des tarifs douaniers américains et chinois, devraient exercer une pression à la baisse sur les prix des produits agricoles. Comme les prix sont en baisse, les producteurs et productrices agricoles pourraient faire preuve d’une plus grande prudence dans la planification des superficies et des intrants pour l’an prochain, en tenant compte de la baisse des liquidités et de la rentabilité.

Ratio des prix des cultures

Les ratios des prix des cultures, comme le ratio soya-maïs et le ratio canola-blé, reflètent l’état actuel de l’offre et de la demande. Essentiellement, c’est un signal du marché qui aide les propriétaires d’exploitations agricoles à prendre des décisions en matière d’ensemencement. Les ratios plus élevés favorisent l’ensemencement de superficies d’oléagineux (canola ou soya) tandis qu’un ratio plus bas favorise l’ensemencement de céréales (maïs ou blé).

À l’heure actuelle, les ratios des prix des cultures favorisent l’ensemencement d’oléagineux au lieu de céréales. Même si le ratio favorise actuellement les oléagineux en raison de la forte demande de biocarburants, la demande et les superficies futures dépendront des différends commerciaux avec la Chine, tant pour le Canada que pour les États-Unis. On s’attend à ce que le prix du canola subisse des pressions, à moins que les enjeux commerciaux entre le Canada et la Chine ne soient résolus avant le printemps. De plus, la Chine n’a pas acheté de soya de la nouvelle récolte américaine en raison des tarifs douaniers en vigueur. Si la situation se poursuit, les prix du soya et du canola pourraient chuter davantage, et les ratios des prix des cultures pourraient changer en faveur de l’ensemencement d’une plus grande quantité de maïs et de blé d’ici le printemps (figure 2).

Figure 2 : Les ratios des prix des cultures pourraient favoriser l’ensemencement des céréales d’ici le printemps

Graphique linéaire montrant les rapports entre le prix du soya et celui du maïs et entre le prix du canola et celui du blé de printemps, de janvier 2021 à août 2025, avec des prévisions de prix jusqu’en juin 2026.

Sources : Barchart et Services économiques FAC

Puisque le maïs nécessite davantage d’engrais azotés, une hausse des ensemencements de maïs a tendance à faire augmenter la demande et les prix des engrais azotés. Ainsi, à l’approche des semis, on suit l’évolution du ratio des prix des cultures afin d’estimer la demande en engrais azoté aux États-Unis. Les superficies de maïs prévues aux États-Unis pour 2026 auront encore une incidence sur les prix des engrais azotés.

Ratios des prix engrais-cultures

Le ratio des prix des engrais et des cultures mesure le coût de l’engrais par rapport aux revenus que les propriétaires d’exploitations agricoles attendent de leurs cultures. Un ratio élevé signifie que l’engrais est coûteux par rapport au prix des cultures. À l’inverse, un ratio faible suggère que l’engrais est plus abordable. Ce ratio influence les décisions des agriculteurs et agricultrices en matière d’intrants, à savoir quelles cultures cultiver et quelle quantité d’engrais utiliser pour maximiser la rentabilité.

Nos prévisions relatives au ratio des prix engrais-cultures affichent actuellement une légère baisse de l’abordabilité pour 2026 (figure 3). En outre, il est possible que les prix des cultures baissent davantage, tandis que les prix des engrais pourraient continuer à augmenter. Cette combinaison d’un risque à la baisse pour les cultures et d’un risque à la hausse pour les engrais signifie que le ratio des prix engrais-cultures pourrait encore augmenter.

Figure 3 : Le ratio des prix engrais-cultures demeure élevé et pourrait augmenter davantage

Graphique linéaire montrant l’évolution de l’indice du ratio des prix engrais-culture de 2021 à 2025 pour les rotations de canola-blé et de soya-maïs, avec des prévisions pour 2026.

Sources : Prix des intrants agricoles en Alberta, Statistique Canada et Services économiques FAC

Le commerce mondial et la géopolitique continuent d’influencer l’offre du marché des engrais. La guerre menée par la Russie en Ukraine demeure un facteur clé, en particulier pour l’engrais. Un accord de paix pourrait faire baisser les prix de l’énergie et de l’engrais, ce qui permettrait de relancer les usines européennes d’engrais azoté. Toutefois, la poursuite du conflit maintiendrait les prix à un niveau élevé. Les droits de douane américains imposés à la Russie risquent de faire grimper le coût de l’azote, en particulier dans l’Est du Canada, qui dépend des importations d’engrais à base de nitrate d’ammonium et d’urée des États-Unis, marché largement approvisionné par la Russie.

La Chine a repris des exportations limitées d’engrais uréiques et phosphatés après des années de restrictions. Même de faibles volumes pourraient atténuer les pénuries mondiales, mais il reste à savoir si les exportations progresseront davantage.

La hausse de l’incertitude ne signifie pas que les producteurs et productrices doivent adopter une attitude passive face aux événements extérieurs. Ils et elles doivent se concentrer sur ce qui est contrôlable. Il est essentiel d’établir des relations solides avec les fournisseurs d’intrants et les agronomes. Bon nombre de propriétaires d’exploitations agricoles utilisent désormais des outils de prise décision économique pour améliorer leur efficacité et leur productivité afin de préserver leur rentabilité.

Des pratiques comme la gérance des nutriments 4B qui consiste à appliquer le bon produit, la bonne dose, au bon moment et au bon endroit, sont maintenant utilisées sur plus de 25 millions d’acres, soit près de 27 % de l’ensemble des terres agricoles au Canada, contribuant ainsi à réduire les coûts.

Les seuils économiques permettent de déterminer quand les intrants tels que les traitements antiparasitaires ou fongicides valent le coût, en se concentrant sur la rentabilité plutôt que sur l’apparence du champ. Des outils comme les calculateurs d’efficience des engrais (p. ex., Manitoba Agriculture) guident les cibles d’utilisation et de rendement optimales, tandis que les seuils de fongicides permettent d’évaluer les gains de rendement par rapport aux coûts des intrants, évitant ainsi les dépenses inutiles.

La pulvérisation aérienne gagne du terrain en raison de sa vitesse et de la réduction des dommages aux cultures. Bien qu’elle soit légèrement plus chère à l’acre, elle devient rentable lorsqu’on comptabilise les pertes attribuables au piétinement par l’équipement au sol.

Ensemble, ces approches témoignent de la nécessité de se concentrer sur les éléments que l’on peut contrôler, en misant sur la collaboration dans l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement pour optimiser les rendements. Cette méthode aide à planifier la rotation des cultures et les achats d’engrais et de semences pour la prochaine année, même lorsque les risques sont élevés.

En conclusion

Au Canada, les agriculteurs et agricultrices font face à des perspectives difficiles pour 2026, car la combinaison des coûts élevés des intrants de culture et de la baisse des prix des produits agricoles comprime les marges. Les tensions commerciales mondiales, en particulier avec la Chine, et l’instabilité géopolitique assombrissent davantage les perspectives. Dans ce contexte très incertain, il est plus crucial que jamais de réaliser des économies de coûts et de se concentrer sur les gains de productivité. Tirer parti de l’expertise agronomique, des outils de prise de décision économique et des relations de collaboration avec les fournisseurs peut aider les exploitations agricoles à réaliser des gains d’efficience et à préserver leur rentabilité.

x.com/AndersonLeigh3
Leigh Anderson

Économiste principal

Fort de son expérience dans les marchés agricoles et la gestion du risque, Leigh Anderson est économiste principal à FAC. Il est spécialisé dans la surveillance et l’examen du portefeuille de FAC et de la santé de l’industrie, et il livre des analyses sur les risques liés à l’industrie. En plus de faire des présentations sur l’agriculture et l’économie, Leigh participe régulièrement au blogue des Services économiques de FAC.

Leigh est entré en fonction à FAC en 2015 au sein de l’équipe des Services économiques. Il œuvrait auparavant auprès de la Direction des politiques du ministère de l’Agriculture de la Saskatchewan. Il est titulaire d’une maîtrise en économie agricole de l’Université de la Saskatchewan.