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Les possibles perturbations commerciales assombrissent les solides perspectives du secteur bovin

5 févr. 2025
7,5 min de lecture
Bétail sur paille avec « 2025 » dans le texte.

Le marché des bovins continue d’atteindre de nouveaux sommets. Après de longues périodes de sécheresse et de coûts élevés des aliments pour animaux, les éleveurs canadiens ont terminé l’an dernier sur une note d’optimisme pour 2025. Les prix des bovins atteignent des sommets inégalés, la disponibilité des aliments pour animaux s’est accrue et leur coût diminue.  

Malgré les prix records du bétail et la rentabilité élevée, le cheptel bovin canadien a atteint en 2024 son plus bas niveau en trente ans, tandis que le nombre de génisses de remplacement avoisinait un plancher historique. Le cheptel américain se trouve dans une situation semblable, puisque le nombre de vaches a diminué en 2024, ce qui s’est reflété dans l’estimation du cheptel bovin au 1er janvier 2025, établie à 73,4 millions de têtes. Nous nous attendons également à une réduction du cheptel bovin canadien.  

Comme nous l’avons expliqué dans nos principales tendances à surveiller en 2025, le taux d’abattage des vaches et des génisses devra diminuer sous 47 % des abattages avant qu’on puisse observer une quelconque croissance du cheptel. Nous prévoyons une certaine baisse du nombre de génisses destinées à l’abattage, mais pas suffisamment pour reconstituer le cheptel. Dans l’ensemble, le petit cheptel bovin nord-américain devrait continuer à faire grimper les prix, ce qui se traduira par une nouvelle année de forte rentabilité pour les éleveurs-naisseurs en 2025 (tableau 1).  

Tableau 1 : Les prix du bétail devraient demeurer élevés en 2025 

Prix du bétail 

Prévisions 2025  

Estimations 2024  

Moyenne 5 ans 

Bouvillon gras de l’Alberta ($/quintal) 

260 

245 

165 

Bouvillon de 550 lb de l’Alberta ($/quintal) 

440 

405 

235 

Bouvillon de 850 lb de l’Alberta ($/quintal) 

355 

330 

205 

Bouvillon gras de l’Ontario ($/quintal) 

260 

240 

165 

Bouvillon de 550 lb de l’Ontario ($/quintal) 

395 

375 

215 

Bouvillon de 850 lb de l’Ontario ($/quintal) 

335 

325 

205 

Sources : Statistique Canada, Agriculture et Agroalimentaire Canada, USDA, CanFax, prix à terme CME et calculs effectués par FAC

Même si les perspectives sont positives pour le prix des bovins grâce aux facteurs qui sous-tendent l’offre et la demande, le secteur surveillera de près l’incertitude entourant les barrières commerciales possibles. Tout tarif douanier appliqué aux exportations canadiennes aura un impact sur le secteur du bétail tant au Canada qu’aux États-Unis, compte tenu de la forte intégration du marché nord-américain. Le Canada exporte 17 % de sa production totale de bovins, et les exportations vers les États-Unis représentent 99 % de toutes ses exportations. Parmi les bêtes envoyées aux États-Unis, 70 % sont destinées à l’abattage. Le Canada importe également des bovins pour les engraisser jusqu’à ce qu’ils soient prêts pour l’abattage. Plus de la moitié de la viande des bœufs abattus au Canada est exportée, la majeure partie étant destinée aux États-Unis. Nous comptons également sur certaines importations de bœuf américain pour répondre à la demande canadienne. Cette interdépendance entre les deux pays signifie que les droits de douane, ou tout autre obstacle au commerce, perturberont considérablement les élevages des deux côtés de la frontière.

Les tarifs douaniers proposés devraient exercer une pression sur les prix des bovins canadiens

Les prix des bovins gras et des bovins d’engraissement canadiens suivent les tendances des prix à terme des bovins vivants et des bovins d’engraissement, tous établis en dollars américains. L’écart entre le prix au comptant canadien et les prix à terme s’appelle la base (prix au comptant – prix à terme = base). Si des tarifs douaniers sont ajoutés, alors les niveaux de base sont susceptibles de monter, puisque les acheteurs refileront aux vendeurs les coûts engendrés par les tarifs.

Les restrictions commerciales imposées par les États-Unis dans le passé peuvent fournir des indications sur l’impact éventuel des tarifs douaniers sur les prix. La présence de l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) au Canada de 2003 à 2005 et l’étiquetage obligatoire du pays d’origine (mCOOL) de 2009 à 2015 illustrent à quel point les niveaux de base peuvent s’accroître (figure 1). Nous estimons que les prix des bovins canadiens pourraient diminuer de 5 % à 10 %, si des tarifs douaniers de 25 % sont appliqués à la frontière américaine. Par exemple, nos prévisions de prix pour les bovins d’engraissement de 850 livres tomberaient dans une fourchette de 320 $ à 340 $ par quintal. Peu importe l’ampleur des niveaux de base, en pourcentage des prix à terme en dollars canadiens, les répercussions ne seront pas aussi graves que celles de l’ESB. Néanmoins, toute restriction commerciale entraînera une baisse des prix au comptant au Canada. En revanche, si l’imposition des tarifs douaniers est de courte durée, les répercussions seront moindres.

Figure 1 : Les niveaux de base devraient augmenter pour les bovins gras et les bovins d’engraissement canadiens

Graphique illustrant les niveaux de base pour les bovins gras et les bovins d'engraissement canadiens en pourcentage des prix à terme du bétail.

Sources : prix à terme CME, Statistique Canada et calculs de FAC

En outre, l’incidence des tarifs douaniers sur la chaîne d’approvisionnement canadienne en bétail variera en fonction des facteurs qui sous-tendent l’offre et la demande, de l’exposition au marché américain et de la durée de l’imposition des tarifs. En ce qui concerne les éleveurs-naisseurs, les répercussions se feront sentir davantage, car les prix offerts pour le bétail diminueront pour compenser l’accroissement du risque lié à l’exportation aux États-Unis. Les parcs d’engraissement, en particulier ceux qui exportent vers les États-Unis, ne savent pas si des tarifs douaniers seront en vigueur ou si les éventuels tarifs auront augmenté au moment où les veaux d’engraissement seront prêts pour l’abattage. Les abattoirs américains risquent d’ajuster les prix offerts et leurs volumes d’achat de bovins canadiens. En ce qui concerne les transformateurs de viande canadiens, les exportations de bœuf en caisse carton vers les États-Unis seront également exposées à des risques et leur prix diminuera probablement pour pouvoir faire concurrence sur le marché américain.

Dans l’ensemble, compte tenu des solides marges actuelles, le secteur de l’élevage-naissage est mieux placé pour amortir le choc des potentiels tarifs douaniers américains, même si la rentabilité sera probablement réduite. Le secteur des parcs d’engraissement, dont la rentabilité devrait s’améliorer cette année, risquerait de rapporter moins, selon l’ampleur et la durée de l’application des tarifs. La complexité des répercussions des tarifs dépendra de la manière dont les différents acteurs de la chaîne d’approvisionnement réagiront pour atténuer leurs risques.

Par exemple, les grossistes en bœuf américains et canadiens pourraient ajuster leurs stratégies. Le secteur bovin adopte actuellement une approche attentiste, limitant les nouvelles ventes de bétail aux États-Unis afin de réduire le risque que des tarifs soient en vigueur au moment de l’abattage. Les acteurs du secteur se tiennent au courant des mises en marché tout en faisant attention aux placements dans les parcs d’engraissement. Les importations de bovins d’engraissement sont susceptibles de ralentir à mesure que les exportations diminuent et que les parcs d’engraissement se tournent vers un approvisionnement national.

Si les potentiels tarifs douaniers américains sont le principal facteur influençant les perspectives du bétail selon nous cette année, d’autres tendances sont également à surveiller.

Tendances à surveiller en 2025

1. La demande des consommateurs

Les consommateurs de bœuf ont fait preuve de résilience. Pendant combien de temps les consommateurs continueront-ils d’acheter du bœuf à des prix records? Les consommateurs de bœuf ont-ils un point de bascule, et comment leur comportement de consommation est-il influencé par le prix des protéines animales concurrentes? Si les consommateurs se retirent, on peut s’attendre à ce que les prix du bétail atteignent leurs limites. Tant que la demande des consommateurs ne commencera pas à diminuer, les marchés du bétail resteront solides.

2. La valeur du dollar canadien

Le dollar canadien influencera la valeur des bovins et le coût des aliments pour animaux. Toute dépréciation du dollar canadien fera grimper les prix des bovins que touchent les agriculteurs, mais pourrait également augmenter les coûts des céréales fourragères. Nous estimons qu’un recul de 1 % du dollar augmente les recettes monétaires des exploitations de bovins d’environ 0,6 %.

3. L’étiquetage volontaire du pays d’origine (vCOOL)

Les règles vCOOL, qui entreront en vigueur le 1er janvier 2026, compliquent également les perspectives des exportations de bovins vers les États-Unis. Ces règles exigent que les animaux nés, élevés, abattus et transformés aux États-Unis soient étiquetés comme « produits des États-Unis » (actuellement, les entreprises américaines sont autorisées à importer des animaux du Canada, à les élever ou à les abattre, et à les étiqueter « produits des États-Unis »). Si janvier 2026 peut sembler très éloigné, les décisions relatives au placement des veaux dans les parcs d’engraissement se feront sentir bien plus tôt, car certains veaux sont placés dans ces parcs jusqu’à neuf mois avant d’être prêts pour l’abattage. Cette politique, même si elle demeure volontaire, risque d’affaiblir la demande pour les bovins canadiens exportés vers les États-Unis et d’augmenter les niveaux de base au Canada. Les abattoirs américains commenceront à ajuster leurs achats de bovins pour se préparer aux changements. De plus en plus d’abattoirs de bœuf aux États-Unis devraient procéder à des ajustements à mesure que l’année 2025 avance.

En conclusion

Le secteur bovin canadien devrait connaître une autre année de prix élevés et d’augmentation de la rentabilité grâce aux solides facteurs fondamentaux du marché (y compris la petite taille du troupeau) et à une forte demande. Les perspectives sont toutefois assombries par les tarifs douaniers américains potentiels et d’autres perturbations commerciales latentes.

x.com/AndersonLeigh3
Leigh Anderson

Économiste principal

Fort de son expérience dans les marchés agricoles et la gestion du risque, Leigh Anderson est économiste principal à FAC. Il est spécialisé dans la surveillance et l’examen du portefeuille de FAC et de la santé de l’industrie, et il livre des analyses sur les risques liés à l’industrie. En plus de faire des présentations sur l’agriculture et l’économie, Leigh participe régulièrement au blogue des Services économiques de FAC.

Leigh est entré en fonction à FAC en 2015 au sein de l’équipe des Services économiques. Il œuvrait auparavant auprès de la Direction des politiques du ministère de l’Agriculture de la Saskatchewan. Il est titulaire d’une maîtrise en économie agricole de l’Université de la Saskatchewan.