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Principales tendances économiques de 2021 : les occasions et les risques pour les exportations de céréales, d’oléagineux et de légumineuses

12 janv. 2021
9 min de lecture

Après le revers douloureux découlant d’une contraction de l’économie mondiale d’environ 4,2 % causée par la COVID-19 en 2020, l’économie devrait rebondir dans une proportion similaire en 2021. Le moindre faux pas, qu’il s’agisse de nouvelles éclosions ou de ratés dans la distribution du vaccin, fera planer un doute sérieux quant à la croissance économique cette année, mais une protection efficace contre le virus pourrait stimuler le revenu par habitant à l’échelle planétaire. La grande question demeure de savoir comment les retombées sanitaires et économiques de la COVID-19 s’entrecroiseront avec les changements climatiques et les tensions géopolitiques pour influer sur la production agricole et les échanges commerciaux cette année.

La semaine dernière, nous avons décrit l’influence de ces trois forces perturbatrices sur les secteurs canadiens de la viande rouge. Dans le présent billet, nous examinons l’effet qu’elles pourraient avoir sur les marchés internationaux des oléagineux, des légumineuses et du blé.

La COVID-19 n’a aucune emprise sur les besoins des importateurs nets de cultures agricoles dans le monde

Dans de nombreux pays, la production locale de cultures vivrières ne satisfait pas à la demande. Le Japon, par exemple, est très populeux, mais ne possède que très peu de terres. La Chine a une superficie beaucoup plus grande, mais sa population est énorme. Les bulles vertes et les bulles mauves (qui représentent respectivement des pays à faible revenu et des pays à revenu élevé, au-dessus de la ligne rouge) dans les diagrammes ci-dessous montrent quelques-uns des meilleurs débouchés extérieurs pour le Canada. Ces pays sont des importateurs nets, c’est-à-dire des pays qui consomment plus qu’ils ne produisent.

À titre d’exportateur net, le Canada produit plus de grandes cultures qu’il n’en consomme pour l’alimentation humaine, l’alimentation animale et la fabrication de carburant. Cela crée des occasions en 2021 pour le Canada, qui jouit d’une renommée mondiale comme fournisseur fiable de cultures de grande qualité; le virus, si virulent soit-il, ne réduira probablement pas les besoins des importateurs nets.

Le ratio consommation/production : le moteur des exportations

L’endroit où se trouve chacune des bulles dans les diagrammes dépend des déterminants de l’offre et de la demande en 2019. Le ratio consommation/production (CP) représente les volumes de consommation par rapport aux volumes de production. Étant donné que ces déterminants changeront en 2021 en raison des effets combinés de la COVID, des changements climatiques et des tensions géopolitiques (entre autres forces de moindre importance), l’emplacement des bulles risque aussi de changer.

Figure 1 : Les marchés du blé qui affichent un potentiel de croissance subissent aussi de vives tensions exercées par la récession

Graphique montrant que les marchés du blé qui affichent un potentiel de croissance subissent aussi de vives tensions exercées par la récession.

Sources : UN Comtrade (en anglais seulement) Banque mondiale, OCDE et calculs effectués par FAC. Le diagramme représente la production et la consommation de blé ainsi que le PIB en 2019. Les importateurs nets de blé ont un ratio C/P > 1 (au-dessus de la ligne rouge); les exportateurs nets ont un ratio < 1 (sous la ligne rouge). La taille de la bulle représente la consommation (en volume) de chaque pays. Les pays en vert sont des économies émergentes; les pays en bleu représentent la concurrence. Le diagramme comprend les cinq plus grands importateurs et exportateurs de blé, l’Union européenne (28 pays) ayant été sélectionnée plutôt que chaque pays membre. Le Canada est toujours inclus même s’il n’est pas parmi les cinq plus grands exportateurs ou importateurs.

Le Canada, qui possède le ratio C/P le moins élevé de tous les pays choisis (Figure 1), affichait la plus grande proportion de blé destinée à l’exportation par rapport à sa production totale. L’Union européenne et la Russie étaient les principaux exportateurs nets sur le marché.

Parmi les importateurs nets, l’Indonésie et les Philippines, dont la consommation de blé correspondait environ à la moitié de celle de l’Égypte ou de la Turquie, dépendaient malgré tout exclusivement des importations pour satisfaire leurs besoins. Comme leur ratio C/P était nettement supérieur à celui des autres pays, ils sont absents de la Figure 1.

Comme les prix des aliments sont en hausse à l’échelle planétaire, certains des pays illustrés dans le diagramme prennent des mesures directes pour stabiliser leurs marchés intérieurs. Notamment, la Russie imposera ce printemps des quotas d’exportation pour les céréales et une taxe à l’exportation pour le blé afin de freiner la hausse des prix des aliments. L’Argentine suspend quant à elle ses exportations de maïs jusqu’au 1er mars dans le but de maîtriser l’inflation alimentaire. Ces deux dernières années, nous avons bien vu comment les perturbations commerciales peuvent entraîner une volatilité néfaste sur les marchés des produits agricoles.

Continuons de surveiller nos concurrents; l’Australie et la Russie chercheront peut-être à maintenir les volumes élevés de production de blé qu’elles ont enregistrés en 2020, tandis que l’Union européenne et les États-Unis tentent de rebondir.

Figure 2 : Le contraste marqué entre les importateurs nets et les exportateurs nets fait ressortir le dilemme auquel sont confrontés les exportateurs canadiens

Sources : UN Comtrade (en anglais seulement), Banque mondiale, OCDE et calculs effectués par FAC. Le diagramme représente la production et la consommation de légumineuses ainsi que le PIB en 2019. Les importateurs nets de légumineuses ont un ratio C/P > 1 (au-dessus de la ligne rouge); les exportateurs nets ont un ratio < 1 (sous la ligne rouge). La taille de la bulle représente la consommation (en volume) de chaque pays. Les pays en vert sont des économies émergentes; les pays en bleu représentent la concurrence. Le diagramme comprend les cinq plus grands importateurs et exportateurs de légumineuses, l’Union européenne ayant été sélectionnée plutôt que chaque pays membre. Le Canada est toujours inclus même s’il n’est pas parmi les cinq plus grands exportateurs ou importateurs.

Le Canada est un important fournisseur de légumineuses sur le marché mondial. La figure 2 montre un écart marqué entre les importateurs nets et les exportateurs nets de légumineuses. Cette tendance clairement définie par la richesse ne se reflète ni sur le marché du blé ni sur celui du canola. Cela expose-t-il les producteurs canadiens à un risque accru? Encore une fois, ceux-ci affichaient le ratio C/P le plus bas de tous les pays sélectionnés, ainsi que la plus grande proportion de la production nationale de légumineuses destinée à l’exportation. L’Inde est le premier importateur net, et la Chine, même si elle arrive loin derrière, est le deuxième consommateur en importance. L’Égypte a produit une très faible proportion des légumineuses qu’elle consomme, mais elle en consomme aussi très peu.

Même si l’on prévoit un accroissement de la production mondiale en 2021, chaque importateur net qui figure dans le diagramme devrait demeurer un importateur net. L’Inde continuera d’avoir un poids disproportionné sur les marchés mondiaux des légumineuses.

Figure 3 : Les petits marchés du canola sont ceux qui affichent la plus grande diversification

Graphique montrant les petits marchés du canola sont ceux qui affichent la plus grande diversification.

Sources : UN Comtrade (en anglais seulement) Banque mondiale, OCDE et calculs effectués par FAC. Le diagramme représente la production et la consommation d’oléagineux ainsi que le PIB en 2019. Les importateurs nets d’oléagineux ont un ratio C/P > 1 (au-dessus de la ligne rouge); les exportateurs nets ont un ratio < 1 (sous la ligne rouge). La taille de la bulle représente la consommation (en volume) de chaque pays. Les pays en vert sont des économies émergentes; les pays en mauve représentent des économies plus riches; les pays en orange sont des importateurs nets zéro; les pays en bleu représentent la concurrence. Le diagramme comprend les cinq plus grands importateurs et exportateurs d’oléagineux, l’Union européenne étant sélectionnée plutôt que chaque pays membre. Le Canada est toujours inclus même s’il n’est pas parmi les cinq plus grands exportateurs ou importateurs.

Environ la moitié de la production totale de canola du Canada a été utilisée sur le marché intérieur (Figure 3). La Chine et l’Union européenne ont surpassé le Canada haut la main sur le plan de la production, mais leur consommation respective a aussi été nettement supérieure à celle du Canada en 2019. L’Inde, plus important consommateur de canola au monde, et les États-Unis étaient des producteurs nets zéro : ils en ont consommé autant qu’ils en ont produit, ni plus ni moins.

Pourquoi cela est-il important?

La COVID-19 est la principale responsable de la récession mondiale de 2020, qui est la pire depuis des décennies. On prévoit que la croissance du revenu par habitant aura été durement touchée, en particulier dans les pays émergents et les pays en développement. Bon nombre d’entre eux sont et demeureront des importateurs nets de produits agricoles et de denrées alimentaires, ce qui alimente le spectre d’une insécurité alimentaire grandissante et, d’un point de vue plus optimiste, offre la possibilité de subvenir à ces besoins.

Néanmoins, les exportateurs canadiens dépendent de la bonne santé des populations et des économies des pays importateurs. La période qui suivra la pandémie créera des filons inconnus pour les exportateurs qui sont capables de prévoir les besoins futurs, mais les marchés du travail à l’échelle mondiale peinent toujours à s’adapter à la nouvelle réalité dans laquelle des millions d’emplois ont disparu. La « Grande réinitialisation » a été imaginée, en partie, pour reconnaître que des millions de personnes ont risqué leurs vies pour se rendre au travail afin que des millions d’autres puissent rester à la maison. Il reste à déterminer les répercussions que la COVID a déjà eues et continuera d’avoir sur la croissance du PIB par habitant de chaque pays et sur le ratio consommation/production illustré dans chaque diagramme. Nous savons toutefois que la reprise mondiale prend la forme d’un « K » (en anglais seulement), et non la forme d’un « V », qui est plus uniforme et moins préoccupante. Cette reprise amènera donc un changement des tendances de la demande d’aliments, au Canada et ailleurs dans le monde.

Ce défi sérieux survient dans le contexte des changements climatiques. Les phénomènes météorologiques d’envergure et la hausse graduelle du niveau des océans et des températures qui découle de ces changements accroîtront et diminueront tout à la fois les possibilités en matière de production en 2021.

Certaines des plus grandes menaces posées par les changements climatiques touchent des marchés émergents comme la Chine, l’Inde et l’Indonésie – marchés sur lesquels comptent les exportateurs de cultures agricoles canadiens pour assurer leur croissance. Ces pays sont souvent plus exposés à l’élévation du niveau des océans et aux précipitations anormales. Il est difficile de dire avec exactitude dans quelles régions du monde les changements climatiques toucheront l’agriculture en 2021. Mais le ralentissement de la croissance du PIB par habitant qu’ils entraîneront, conjugué aux chocs liés à la COVID-19, minera la santé de toutes les économies, en particulier celle des économies émergentes et en développement.

Martha Roberts

Rédactrice économique

Membre de l’équipe des Services économiques depuis 2013, Martha Roberts est une spécialiste en recherche qui étudie les risques et les facteurs de réussite pour les producteurs agricoles et les agroentreprises. Martha compte 25 années d’expérience dans la réalisation de recherches qualitatives et quantitatives et la communication des résultats aux spécialistes de l’industrie. Elle est titulaire d’une maîtrise en sociologie de l’Université Queen’s à Kingston, en Ontario, et d’une maîtrise en beaux-arts en écriture non fictive de l’Université de King’s College.