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Les perspectives des secteurs canadiens des cultures sont incertaines, mais devraient demeurer stables pour 2019

14 août 2019

L’équipe de l’Économie agricole de FAC jette un regard de mi-année sur nos perspectives économiques de janvier 2019. Pendant les mois de juillet et août, nous ferons le point sur nos attentes au sujet de la rentabilité dans sept secteurs agricoles canadiens (soit les secteurs des produits laitiers, du poulet à griller, de la viande rouge, de la transformation alimentaire, de l’horticulture, de l’agroentreprise ainsi que le secteur des céréales, oléagineux et légumineuses). Nous décrirons ce qui s’est passé en 2019 jusqu’ici et ce que vous devriez surveiller au cours des six prochains mois.

Les perspectives continuent de s’améliorer pour plusieurs secteurs canadiens des cultures. Nos prévisions contrastées de janvier concernant la rentabilité du secteur céréalier demeurent inchangées : les marges des producteurs de blé de printemps demeurent tout près du seuil de rentabilité ou sont légèrement supérieures à celui‑ci, mais celles des producteurs de blé d’hiver seront sous pression jusqu’à la fin de l’année. Les marges des producteurs de maïs devraient être positives, et celles des producteurs de canola, de soya et de lentilles devraient aussi demeurer près du seuil de rentabilité.

De forts vents contraires continuent toutefois de souffler. Les tensions commerciales entre la Chine et les États‑Unis et les problèmes d’accès au marché pour les cultures canadiennes demeurent les principaux obstacles à la rentabilité. La production de cultures devra augmenter cette année afin de compenser la faiblesse des prix du soya, des légumineuses et du canola, qui devraient rester bas. Les prix du maïs canadien sont très variables à l’heure actuelle en raison de l’offre aux États‑Unis, qui constitue un élément d’incertitude important.

Malgré des vents contraires importants, les perspectives continuent de s’améliorer pour plusieurs secteurs canadiens des cultures.

Tendances à surveiller pour le secteur des cultures

  • Les conditions météorologiques, les rendements, les maladies et la récolte

  • Les tensions commerciales mondiales et les exportations nord‑américaines

  • Les coûts des intrants

  • Les fluctuations du dollar canadien

Conditions météorologiques, rendements, maladies et récolte

L’équilibre entre l’offre et la demande demeure la grande incertitude en ce qui a trait à de nombreuses cultures pour 2019.

Dans son rapport du mois d’août sur la production de cultures, l’USDA a révisé à la baisse ses estimations concernant la superficie ensemencée en maïs aux États‑Unis comparativement au rapport du mois de juillet, mais a haussé le rendement prévu faisant chuter les prix du maïs en raison d’une offre plus importante.

Les estimations de cette année concernant la production de maïs aux États‑Unis et au Canada sont particulièrement difficiles à évaluer. L’attention se porte maintenant sur les rendements. À cet effet, de nombreuses acres de maïs ont été ensemencées tardivement, et les intrants ont été utilisés avec parcimonie pour la production des cultures jugées moins importantes. Toutefois, dans certaines régions au cours de la présente année commerciale, les conditions météorologiques se sont améliorées, ce qui augmente les chances que les acres ensemencées assez tôt offrent une production quasi normale. Cependant, la qualité et les rendements restent à déterminer.

Les projections de l’USDA concernant le prix du maïs pour l’année commerciale 2019‑2020 (en anglais seulement) s’établissent désormais à 3,60 $ le boisseau, soit au même niveau que celui de l’année commerciale précédente. Toutefois, ces prix pourraient atteindre des niveaux plus élevés dans un proche avenir si les hypothèses à l’égard des rendements ou de la superficie ensemencée s’avéraient trop optimistes. La base pourrait également s’améliorer à certains endroits pour les producteurs canadiens. La production de maïs en Ontario a été retardée en raison d’un printemps humide, et le nombre d’acres viables pourrait être inférieur d’un demi‑million (en anglais seulement) à l’estimation précédente de Statistique Canada, qui s’établissait à 2,2 millions d’acres.

Les conditions météorologiques ont aussi porté un dur coup au soya et au blé de l’Ontario. La menace posée par la vomitoxine (désoxynivalénol ou DON) (en anglais seulement) continue de planer sur cette province, entraînant un développement très inégal des cultures qui accentue le risque et retarde la récolte. Les producteurs canadiens ont ensemencé moins d’acres de soya cette année, mais comme les prix sont plus bas, la production a d’excellentes chances d’être rentable. Les répercussions des conditions météorologiques sur les superficies ensemencées en Ontario devraient faire diminuer la production.

Ailleurs au Canada, les cultures de 2019 se portent bien. Même si une faible proportion des lentilles de l’Alberta sont considérées comme « en bon état », la production de lentilles, de pois et de soya dans l’ensemble des Prairies devrait frôler, voire dépasser légèrement, les niveaux moyens. À la fin du mois de juillet, les cultures de blé d’hiver et de blé de printemps de l’Alberta et de la Saskatchewan se portaient bien, voire mieux que la moyenne. L’état des principales cultures (blé de printemps, blé dur, canola, pois) variait considérablement à l’échelle de la province, mais en général, les proportions considérées comme étant dans un « bon » ou un « excellent » état étaient supérieures aux moyennes sur cinq ans et sur dix ans. Ce résultat devrait faire augmenter légèrement les stocks de pois en fin de campagne; les stocks de lentilles, eux, devraient diminuer légèrement, et ce, malgré l’augmentation prévue de la production. 

Les stocks canadiens de blé autre que le blé dur ont progressé légèrement d’une année sur l’autre au cours de l’année commerciale 2018-2019, mais la demande intérieure a contribué à stabiliser les prix. Les exportations canadiennes ont augmenté par rapport à l’année dernière, faisant diminuer les stocks en fin de campagne, ce qui s’inscrit dans la tendance des stocks mondiaux (États‑Unis exclus).

Si l’on examine ce que nous réserve l’année commerciale 2019‑2020, la superficie ensemencée en blé dans de nombreux pays qui sont d’importants producteurs, dont le Canada, devrait augmenter, ce qui fait gonfler les estimations concernant la production, les approvisionnements et les stocks en fin de campagne à l’échelle mondiale. Compte tenu de la concurrence accrue exercée par d’autres exportateurs, les stocks canadiens en fin de campagne devraient croître. Selon Agriculture et Agroalimentaire Canada, la moyenne saisonnière du prix à la production prévue en juillet pour le blé est de 240 $ la tonne, ce qui est légèrement inférieur au prix de 245 $ prévu pour 2018‑2019.

Tensions commerciales mondiales et exportations nord-américaines

La récente vague d’animosité entre certains pays se traduit par l’imposition de nouveaux tarifs et par une incertitude encore plus grande, ce qui ne laisse rien présager de bon pour la santé de l’économie mondiale. Cette situation a aussi provoqué la récente chute des prix du soya aux États-Unis, ce qui compromet les estimations antérieures plus ambitieuses concernant les exportations de soya des États‑Unis.

La production de soya pour 2019‑2020 comparativement à l’année précédente (en anglais seulement) est moins abondante en raison de la diminution des superficies ensemencées et récoltées aux États‑Unis et au Canada, ainsi que des rendements qui s’annoncent moins élevés. Mais cette diminution ne sera pas assez marquée pour alléger les stocks nord‑américains. Ainsi, les stocks de soya en fin de campagne aux États‑Unis pour 2019‑2020 devraient atteindre (site en anglais seulement) 755 millions de boisseaux, ce qui constitue une diminution salutaire de 29,4 % sur douze mois par rapport à l’estimation concernant les stocks en fin de campagne pour 2018-2019, mais un accroissement de 72,3 % par rapport aux stocks en fin de campagne de 2017‑2018. Cette surabondance risque d’être accentuée par l’interruption récente des échanges commerciaux et la concurrence accrue exercée par les fournisseurs sud-américains.

Les exportations canadiennes de soya étaient légèrement en baisse au cours des six premiers mois de 2018 comparativement aux douze mois précédents, mais au cours de la même période en 2019, ils ont à nouveau chuté, dans une proportion de près de 30 %. Nos exportations à destination des États‑Unis et de la Chine ont diminué de 30,1 % et de 90,8 % respectivement. La moyenne saisonnière du prix du soya pour 2019‑2020 devrait s’établir à 410 $ la tonne, ce qui est légèrement supérieur à l’estimation de 2018‑2019, qui était de 405 $, mais nettement inférieur au prix de 434 $ atteint en 2017‑2018.

Le point positif est que dix jours avant la fin de la campagne agricole 2018‑2019, les exportations totales de grain du Canada (en anglais seulement) dépassaient de 2,6 millions de tonnes les niveaux de 2017‑2018. Les exportations canadiennes de blé ont crû de 11,5 % entre janvier et juin par rapport à la même période l’année précédente, et l’augmentation des volumes destinés à trois de nos cinq principaux marchés d’exportation aide à contrebalancer la diminution des exportations à destination des États‑Unis et du Japon au cours de la première moitié de l’année par rapport à la même période l’année précédente.

Les exportations de légumineuses canadiennes pourraient aussi rebondir. En effet, en date du 1er juillet, les exportations totales de pois étaient en hausse de 11,6 % par rapport à l’année précédente, et les exportations de lentilles étaient supérieures de 19,4 %. Le Bangladesh et l’Inde ont augmenté leurs importations respectives de pois et de lentilles du Canada par rapport aux volumes de l’année précédente, mais le reste de la saison de croissance des cultures kharif aura une incidence déterminante sur leur besoin d’en importer davantage. Les prix des pois et des lentilles (en anglais seulement) devraient se stabiliser d’ici la fin de l’année, tendance attribuable à la demande de transformation intérieure plus élevée.

La situation du canola demeure très incertaine en raison des problèmes d’accès au marché de la Chine. Pour en savoir davantage à ce sujet, veuillez consulter nos perspectives de juin concernant le canola.

Ralentissement de la hausse des coûts d’intrants

La diminution des recettes monétaires agricoles enregistrées en 2018 se traduit par l’accès à des flux de trésorerie moins élevés pour l’achat d’intrants et d’équipements en 2019. Les coûts des intrants étaient en hausse au début de l’année; entre janvier et juin, les prix de l’engrais ont augmenté de 10,4 % en moyenne par rapport à la même période l’année précédente. Les prix des pesticides ont crû de 1,3 % en moyenne.

D’ici la fin de l’année, nous prévoyons que les prix de l’engrais demeureront assez stables, tendance attribuable à une baisse saisonnière, au taux de change et à la réaction prévue du marché à la piètre qualité des conditions de culture préliminaires.

Le ralentissement du début de 2019 interrompt les hausses de taux; le huard se maintient autour de 0,75 $ US.

Les taux d’intérêt et la valeur du dollar canadien ont eu une incidence sur la rentabilité des exploitations agricoles et des agroentreprises canadiennes pendant la première moitié de 2019.

L’économie canadienne a enregistré une hausse du PIB en dollars constants de 0,4 % au cours du premier trimestre, laquelle était précédée d’une hausse de 0,3 % au dernier trimestre de 2018. Selon la Banque du Canada (BdC), la croissance économique devrait s’accélérer pendant la seconde moitié de 2019, tandis que le taux d’inflation devrait demeurer autour du point médian de 2 % de la fourchette visée par la BdC.

Nos perspectives relatives aux taux d’intérêt ont considérablement changé depuis janvier 2019 en raison du ralentissement de la croissance économique. Nous ne nous attendons pas à ce que la BdC hausse son taux directeur d’ici la fin de l’année 2019, alors que les marchés financiers laissent croire qu’une baisse des taux est possible. Il en découle une diminution des taux d’intérêt à long terme, ce qui offre aux entreprises la possibilité de bloquer à long terme des taux historiquement bas.

Notre prévision de janvier d’un huard à 0,75 $ US en 2019 était en plein dans le mille jusqu’à la mi‑juin. Nous maintenons cette prévision, mais tout raffermissement du dollar canadien au cours des six prochains mois aurait une double incidence : diminution du coût des intrants importés, et affaiblissement de la compétitivité du Canada sur les marchés internationaux pour les exportations de produits agricoles.

Faisant preuve d’une certaine vigueur, l’économie américaine a affiché une hausse de 3,2 % de son PIB en dollars constants pendant le premier trimestre de 2019, et une hausse de 2,2 % de ce même indicateur au deuxième trimestre. Malgré tout, la Réserve fédérale des États‑Unis a procédé à une réduction de son taux directeur afin d’atténuer le risque d’un ralentissement de l’économie mondiale. On peut s’attendre à d’autres réductions des taux d’intérêt avant la fin de l’année. Des taux d’intérêt plus faibles aux États‑Unis pourraient faire bondir légèrement le huard.

À l’inverse, une baisse potentielle des prix du pétrole affaiblit les prévisions pour le dollar canadien. Des interruptions à l’approvisionnement et des mesures de contrôle de la production ont eu pour effet d’établir le prix du pétrole brut de la West Texas Intermediate (WTI) à 57 $ US en moyenne. Le prix de référence du pétrole brut canadien a également fait un bond à cause des réductions de production en Alberta plus tôt cette année. Néanmoins, la croissance économique mondiale s’est essoufflée (conformément aux prévisions du début d’année) en raison des tensions commerciales, lesquelles ont affaibli la demande mondiale de pétrole. En conséquence, le huard se maintient toujours aux environs de 0,75 $ US.

Facteurs à surveiller

  • Le rapport du mois d’août de l’USDA sur la production de cultures (qui contient des estimations mises à jour concernant les superficies de maïs et de soya).

  • La production sud‑américaine d’animaux d’élevage et de cultures. La relation grandissante entre la Chine et les fournisseurs sud‑américains pourrait être déterminante. Le Brésil, qui est en train de développer son infrastructure nationale de déchargement et de livraison de céréales (site en anglais seulement), a enregistré des exportations record à son port méridional en 2019.

Martha Roberts

Rédactrice économique

Membre de l’équipe des Services économiques depuis 2013, Martha Roberts est une spécialiste en recherche qui étudie les risques et les facteurs de réussite pour les producteurs agricoles et les agroentreprises. Martha compte 25 années d’expérience dans la réalisation de recherches qualitatives et quantitatives et la communication des résultats aux spécialistes de l’industrie. Elle est titulaire d’une maîtrise en sociologie de l’Université Queen’s à Kingston, en Ontario, et d’une maîtrise en beaux-arts en écriture non fictive de l’Université de King’s College.