Coup d’œil sur la santé financière du secteur laitier
Notre série de billets sur la santé financière offre deux enseignements précieux :
Nous devons examiner un ensemble de plusieurs ratios pour entrevoir ce que l’avenir réserve à un secteur donné.
Les secteurs agricoles du Canada sont en bonne santé, mais chacun est confronté à des vents contraires différents qui sont attribuables à des structures financières et à des contextes d’exploitation très distincts.
Ensemble, le ratio du fonds de roulement, le ratio des charges d’exploitation, le ratio de couverture du service de la dette et le ratio de levier nous renseignent sur l’actif, le passif et la valeur nette à court terme et à long terme. Ce sont des postes du bilan qui sont étroitement liés aux recettes et aux charges d’un secteur donné – ou qui reflètent la vigueur des résultats. Les recettes doivent permettre de couvrir les charges et la dette à court terme, d’honorer les obligations au titre de la dette à long terme et, en définitive, d’accroître la valeur nette.
Par ailleurs, la dette peut servir à exploiter de nouveaux débouchés. L’endettement peut être judicieux, mais il comporte néanmoins certains risques. Pour déterminer le bien-fondé d’une dette, il faut tenir compte des recettes et, plus important encore, du revenu net afin d’évaluer correctement le potentiel et le risque que cette dette représente.
Dans ce billet, je me pencherai sur les quatre ratios utilisés dans le secteur laitier pour illustrer la situation financière unique d’un secteur donné.
Quelles sont les perspectives du secteur laitier canadien?
Le prix du lait a remonté vers la fin de 2018, mais les marges des exploitations laitières demeurent sous pression cette année. Ces pressions devront être atténuées au moyen de gains d’efficience.
Ratios du secteur laitier de 2013 à 2017
Les recettes sont à la base d’une bonne santé financière. Voici des faits saillants du secteur laitier pour la période comprise entre 2013 et 2017, tirés de l’Enquête financière sur les
fermes :
Les recettes brutes ont augmenté de 24,4 %. En raison d’un surplus croissant de solides non gras, le prix du lait a chuté, ce qui a stimulé à la fois la demande et les revenus.
La production a augmenté pour satisfaire la demande, ce qui a entraîné une hausse de 25,9 % des charges d’exploitation.
La croissance des recettes n’a pas été suffisante pour contrebalancer l’accroissement des charges. Toutefois, le ratio des charges d’exploitation moyen pour cette période est demeuré inchangé, ce qui signifie que les producteurs ont réalisé des gains d’efficience pour compenser l’augmentation des charges (Figure 1). Le ratio du fonds de roulement moyen est aussi demeuré généralement stable, ce qui indique que la plupart des exploitations disposaient de liquidités suffisantes tout au long de cette période.
Les exploitations ont investi pour accroître leur capacité de production afin de satisfaire la demande grandissante. Ces investissements se sont traduits par :
une augmentation du passif total de 49,5 %;
une augmentation de l’actif total de 33,5 %;
une augmentation de la valeur nette de 27,5 %.
Le ratio de levier moyen a augmenté sous l’effet de la hausse des emprunts. En fait, le passif total a progressé plus rapidement que les capitaux propres et les recettes au cours de cette période. Le ratio moyen de couverture du service de la dette est demeuré positif – ce qui indique que le revenu net a été suffisant pour permettre aux producteurs laitiers de respecter leurs obligations croissantes au titre de la dette. En 2017, le taux directeur de la Banque du Canada a augmenté de 50 points de base, faisant augmenter les coûts d’emprunt; en conséquence, certains producteurs laitiers ont dû consacrer une part plus élevée de leurs recettes au remboursement de leur dette.
Figure 1 : Le secteur laitier a réussi à trouver le juste équilibre entre l’actif et le passif
Le prix du lait a remonté vers la fin de 2018, mais les marges des exploitations laitières demeurent sous pression cette année. Ces pressions devront être atténuées au moyen de gains d’efficience.
Ce que vous pouvez faire
La stabilité du secteur laitier canadien mesurée par ces quatre ratios financiers masque certains indicateurs importants. En effet, ces ratios reflètent la situation des producteurs moyens seulement; nombre d’exploitations laitières canadiennes diffèrent du point de vue des flux des rentrées, de l’efficacité, des obligations au titre de la dette et du fonds de roulement. Quoi qu’il en soit, l’évolution de l’environnement économique fait que les exploitants devront enregistrer des recettes plus élevées en 2019 pour couvrir la dette à long terme contractée récemment et composer avec le ralentissement de la demande de produits laitiers.
L’analyse des ratios est un élément clé de la gestion des exploitations agricoles, mais la gestion intégrale des risques va au-delà de la simple analyse des ratios. Travaillez avec votre prêteur et votre comptable pour déterminer les ratios suggérés pour votre secteur d’activité et assurez-vous de les comprendre en fonction de votre propre stratégie et des risques auxquels votre entreprise est exposée.
Vice-président exécutif, Stratégie et Impact et économiste en chef
Jean-Philippe est Vice-président exécutif, Stratégie et Impact et économiste en chef à FAC. Il offre des conseils qui aident à orienter la stratégie de FAC et qui servent à identifier les risques et opportunités dans l’environnement d’affaires. En plus d’agir comme porte-parole de FAC pour des questions économiques, Jean-Philippe offre ses commentaires sur l'industrie agricole et agroalimentaire dans des vidéos et le blogue des Services économiques FAC.
Avant de se joindre à FAC en 2010, Jean-Philippe était professeur d’agroéconomie à l’Université North Carolina State et à l’Université Laval. Jean-Philippe détient le titre de Fellow de la Société canadienne d’agroéconomie. Il a obtenu son doctorat en économique de l’Université d’Iowa State en 1999.