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La réduction de l’inflation du côté des produits alimentaires ne garantit pas une amélioration de la sécurité alimentaire

29 mai 2024
6,5 min de lecture

Si la richesse et la réputation en matière de produits alimentaires de qualité du Canada, qui se classe au deuxième rang des pays offrant la meilleure qualité de vie (en anglais seulement), restent inégalées, l’abordabilité des aliments y a diminué ces dernières années. Des facteurs tels que l’inflation, les mauvaises conditions météorologiques, les perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales, l’augmentation du coût des intrants et les problèmes de main-d’œuvre ont largement contribué à cette évolution défavorable. Cette situation a entraîné une accentuation de l’insécurité alimentaire, car une flambée des prix des produits alimentaires de base oblige les ménages à faire des choix difficiles. Pour la troisième année consécutive, plus d’un cinquième de la population devrait connaître de l’insécurité alimentaire sous une forme ou une autre, comme en témoigne la baisse projetée des dépenses réelles par habitant consacrées à l’alimentation.  

Portrait actuel de l’insécurité alimentaire au Canada 

Statistique Canada définit l’insécurité alimentaire comme l’incapacité d’accéder à une quantité suffisante de nourriture, en grande partie en raison de contraintes financières. Selon des données récentes de Statistique Canada, on estime qu’en 2022, l’insécurité alimentaire a touché 22,9 % de la population canadienne, soit 8,7 millions de personnes, ce qui représente le taux le plus élevé depuis le début de la collecte des données sur l’insécurité alimentaire en 2018 (figure 1). Depuis 2022, les prix des aliments, du logement et d’autres besoins fondamentaux sont élevés au Canada. L’inflation des produits alimentaires a été supérieure à l’inflation générale et à l’augmentation des revenus, ce qui a entraîné une baisse des dépenses alimentaires en termes réels (c’est-à-dire les dépenses ajustées en fonction de l’inflation), donc une hausse du nombre de ménages en situation d’insécurité alimentaire.  

La diminution des dépenses alimentaires réelles par habitant est particulièrement marquée, 2022 ayant affiché la plus forte baisse annuelle depuis 1961 (figure 1). Les dépenses réelles par habitant des ménages canadiens ont diminué de nouveau l’an dernier et devraient faire de même cette année, ce qui suggère que l’insécurité alimentaire restera élevée au pays. La modération de l’inflation alimentaire devrait toutefois apporter un certain répit.  

Figure 1 : L’insécurité alimentaire a atteint un niveau record en 2022 

La figure 1 montre que l’insécurité alimentaire a atteint un niveau record en 2022.

Sources : Statistique Canada, Services économiques FAC

Comment le Canada se situe-t-il par rapport à ses homologues? 

Le taux d’inflation annuel des denrées alimentaires est passé d’un pic de 10,4 % en janvier de l’année dernière à seulement 2,3 % en avril 2024 et devrait tomber sous la barre des 2 % d’ici la fin de l’année. Nous avons observé des baisses similaires de l’inflation alimentaire dans le monde entier, en grande partie grâce à l’amélioration de l’approvisionnement en produits agricoles et à la diminution des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement mondiales. 

Dans les nations riches, l’alimentation constitue une part moins importante des dépenses totales de consommation. Au cours de la dernière décennie, le Canada s’est classé au troisième rang le plus bas parmi les pays du G7 en ce qui concerne le ratio des dépenses alimentaires par rapport aux dépenses de consommation totales, derrière les États-Unis et le Royaume-Uni, tandis que le Japon affichait le ratio le plus élevé. Cette situation ne devrait pas changer cette année (figure 2).  

Figure 2 : Part des dépenses alimentaires dans la consommation totale 

La figure 2 présente la part des dépenses alimentaires dans la consommation totale.

Sources : OCDE (choisir Français), Services économiques FAC

Qui sont les plus vulnérables face à l’insécurité alimentaire?  

Les ménages à faible revenu souffrent davantage de l’insécurité alimentaire que les ménages à revenu moyen ou élevé. En règle générale, le groupe au revenu le plus faible consacre plus de 20 % de son revenu disponible à l’alimentation, tandis que les ménages à revenu moyen et élevé tendent à dépenser respectivement environ 10 % et 5 % (figure 3).  

Pour 2024, les Services économiques FAC prévoient que les prix des denrées alimentaires et les habitudes de consommation resteront semblables à ceux de l’année dernière, bien que l’inflation alimentaire devrait modérer. L’abordabilité des aliments et des autres produits de première nécessité restera donc une préoccupation majeure pour les Canadiens.  

Figure 3 : Dépenses alimentaires en pourcentage du revenu disponible des ménages 

La figure 3 présente les dépenses alimentaires en pourcentage du revenu disponible des ménages.

Sources : Statistique Canada, Services économiques FAC

Examiner la relation entre le revenu et l’insécurité alimentaire 

Les ménages canadiens dépendent de leur revenu pour satisfaire leurs besoins fondamentaux. Même si la relation entre le revenu et l’insécurité alimentaire est complexe, il est raisonnable d’en déduire que les ménages sont davantage exposés à l’insécurité alimentaire lorsque les prix augmentent plus rapidement que le revenu disponible.  

Après la pandémie, la croissance des salaires a été inférieure à l’inflation, ce qui a réduit le pouvoir d’achat des ménages. Les salaires rattrapent l’inflation, malgré un ralentissement de leur croissance ces derniers temps. Ainsi, si la croissance des salaires s’est améliorée, l’incidence sur la sécurité alimentaire devrait être limitée.  

Pour étudier l’incidence du revenu sur l’insécurité alimentaire, nous avons examiné la relation entre la proportion de la population en situation d’insécurité alimentaire et l’évolution annuelle des dépenses alimentaires réelles par habitant (ajustées en fonction de l’inflation, qui représente un indicateur de consommation). Une hausse des dépenses alimentaires réelles par habitant entraîne une amélioration de la sécurité alimentaire, ce qui se traduit par une réduction du nombre de ménages en situation d’insécurité alimentaire au Canada. Cependant, les projections pour 2024 suggèrent une diminution des dépenses réelles par habitant, ce qui laisse supposer que l’insécurité alimentaire restera un problème.  

Que peut-on faire pour réduire l’insécurité alimentaire au Canada? 

La lutte contre l’insécurité alimentaire nécessite une stratégie globale faisant intervenir l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement alimentaire. Un regain de productivité de l’exploitation agricole, de la transformation alimentaire et de la vente au détail peut stimuler la production et rendre les aliments plus abordables. Le programme En campagne contre la faim de FAC est une initiative menée par l’industrie pour lutter contre l’insécurité alimentaire. Dans le cadre de cette initiative, les agriculteurs, les transformateurs alimentaires, les distributeurs, les épiciers et d’autres unissent leurs efforts pour avoir des effets positifs sur la vie des Canadiens en situation vulnérable. En 2023, l’industrie alimentaire canadienne a fourni collectivement plus de 140 millions de repas pour soutenir les Canadiens et Canadiennes souffrant d’insécurité alimentaire par l’intermédiaire d’organismes de bienfaisance tels que Banques alimentaires Canada et Deuxième Récolte. FAC continuera de collaborer avec ses partenaires afin de cerner des occasions et de produire des résultats significatifs dans les collectivités d’un bout à l’autre du pays afin d’endiguer l’insécurité alimentaire.   

Isaac Kwarteng

Économiste principal

En tant qu’économiste principal à FAC, Isaac Kwarteng se concentre sur la recherche et les prévisions économiques à long terme, en soutien à la stratégie et à la gestion du risque. De plus, il appuie le bureau de la PDG en répondant aux demandes de renseignements et de données.

M. Kwarteng est entré au service de FAC en 2023. Auparavant, il a occupé des fonctions touchant l’économie, la recherche et la statistique pour le gouvernement de la Saskatchewan pendant une décennie.

Titulaire d’une maîtrise en économie de l’Université d’East Anglia, au Royaume-Uni, il détient aussi une maîtrise en statistique de l’Université de Regina, où il est actuellement inscrit au programme de doctorat.