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La quête du bien-être : Le parcours de Lesley Kelly

6 min de lecture
Lesley Kelly, productrice de grains à Watrous (Sask.).

Lesley Kelly, productrice de céréales à Watrous, en Saskatchewan, sait que la résilience dépend du bien-être physique et mental, en agriculture comme dans la vie. La créatrice de High Heels and Canola Fields et la cofondatrice de Do More Ag nous fait part de son expérience.

L’agriculture nécessite une endurance mentale et du soutien

Je n’ai jamais eu l’intention de devenir une ambassadrice de la santé mentale. Il y a environ 10 ans, mon mari Matt et moi avons décidé de retourner à la ferme de mes parents, qui avait perdu de nombreux acres en raison des inondations. J’ai essayé d’aider mes parents, mais je ne connaissais pas les signes de détresse, le langage à utiliser ou les endroits où trouver de l’aide.

Puis, lors de ma deuxième grossesse, je me suis sentie très anxieuse. Le bébé allait bien, mais j’avais de la difficulté. Je me suis renfermée sur moi-même. Je n’arrivais pas à en parler, je négligeais mon alimentation et mon hygiène personnelle. Je ne dormais pas bien et j’ai commencé à m’isoler. Matt m’a aidée à surmonter la dépression postpartum, mais il souffrait lui-même d’anxiété débilitante en travaillant sur la ferme.

Un jour, Matt a eu une crise de panique. J’ai tout de suite pensé qu’il faisait une crise cardiaque! Cette expérience traumatisante a été déterminante. Nous avons compris que nous devions faire les choses différemment pour notre famille et notre exploitation. Nous devions intégrer le bien-être mental dans notre mariage, notre famille élargie et notre entreprise.

Un parcours personnel donne le coup d’envoi à la conversation

À l’été 2017, dans une vidéo que nous avons diffusée en direct sur les médias sociaux, Matt et moi avons parlé de mon expérience postpartum ainsi que de son anxiété. Nous nous demandions si notre marge de crédit d’exploitation ou notre protection d’assurance pourraient être affectées si l’on jugeait que nous présentions un risque plus élevé.

Est-ce que nos propriétaires pourraient mettre fin à nos baux fonciers? Perdrions-nous des amis? Bien que nous nous inquiétions du risque que posait notre prise de parole publique, nous savions que l’agriculture ne devait pas compromettre nos vies.

Nous voulions que les autres sachent qu’ils ne sont pas seuls, qu’il y a de l’espoir. C’est ainsi qu’est née l’idée que les conversations sur la santé mentale pourraient avoir lieu aussi bien dans la cuisine qu’au champ ou dans la salle de réunion.

Bâtir une culture agricole solide

Après avoir partagé nos expériences, nous avons entendu parler de nombreuses personnes qui vivaient des situations semblables. C’est le catalyseur qui m’a permis de comprendre la complexité de la santé mentale : stigmatisation, besoin d’aide, manque de sensibilisation, rareté des ressources, difficulté d’accéder au soutien, etc.

Le succès d’une ferme ne réside pas dans le nombre d’acres, le bilan ou l’équipement, mais plutôt dans la façon dont nous nous soucions de nous-mêmes et des autres.

Aujourd’hui, nous cultivons, avec ma mère et mon frère, environ 7 000 acres. Toutefois, mon père, décédé en 2021, a toujours dit que le succès d’une ferme ne réside pas dans le nombre d’acres, le bilan ou l’équipement, mais plutôt dans la façon dont nous nous soucions de nous-mêmes et des autres.

Si nous sommes nous-mêmes en bonne santé, notre exploitation est plus susceptible de l’être aussi. Lorsque mon père a eu un cancer, il a vécu dans l’anxiété et la dépression. Mon mari a longtemps caché son anxiété à sa famille. Mon frère souffre d’un trouble de stress post-traumatique et d’anxiété. Apprendre à en parler nous a aidés, tout comme la culture que nous avons instaurée à la ferme et au sein de la famille en ce qui a trait à la santé mentale et à la cohésion de l’équipe.

Nous avons appris que nous ne sommes jamais trop occupés pour prendre le pouls des gens qui nous entourent. Nous avons commencé par faire une vérification quotidienne sur une échelle de un à dix, dix étant un niveau de stress élevé ou mauvais. Certains jours, Matt disait se sentir à douze. Nous avons donc commencé à discuter des raisons sous-jacentes, de la manière dont ce chiffre évoluait et de la façon dont nous pouvions l’aider. Parfois, le simple fait de dire ce que je ressens me fait passer de neuf à sept.

L’importance de s’exprimer

Nous savions que le fait de parler publiquement susciterait des réactions. La plupart des commentaires que nous avons reçus étaient positifs, mais on nous a aussi dit : « Si vous ne pouvez pas gérer le stress de l’agriculture, changez de métier » ou « Vous ne devriez même pas vous considérer comme des agriculteurs ». Ces critiques nous ont blessés, particulièrement de la part de nos pairs. J’ai parfois pleuré, mais j’ai surtout pensé à l’agriculteur qui m’a dit : « Vous venez de me sauver la vie. Je vais rentrer à la maison et discuter avec mon épouse. »

Obtenir du soutien personnel et professionnel

Mon père nous a inculqué qu’il est impossible de faire de l’agriculture tout seul : « Ton frère et toi avez besoin l’un de l’autre. Vous êtes plus forts en tant qu’équipe. » Nous nous concentrons sur ce point avec notre famille et notre équipe de soutien, qui comprend notre spécialiste du marketing, notre agronome et notre prêteur.

Nous faisons partie d’un groupe de pairs qui nous aide à être transparents et sur lesquels nous pouvons nous appuyer.

Le changement est progressif

Comme peu de ressources sur la santé mentale en région rurale ou en agriculture sont offertes, j’ai co-créé la Do More Agriculture Foundation pour sensibiliser les agriculteurs et leur proposer de l’aide et des ressources. L’agriculture fait des progrès, l’accès aux services se démocratise et la sensibilisation augmente. Nous devons toutefois continuer à planter ces graines et à encourager les autres tant par le biais de nos différences que de nos similitudes. Et à partager nos histoires.

J’espère que les personnes qui éprouvent des difficultés savent qu’il existe des stratégies et des outils d’adaptation ciblés. Je le fais aussi pour nos fils de neuf et douze ans. Ils en savent déjà plus sur le sujet que j’en ai su moi-même pendant les 40 premières années de ma vie. S’ils veulent retourner à la ferme, ils savent qu’il y a une communauté autour d’eux pour les aider.

Le Centre canadien pour le bien-être agricole vient de lancer la Ligne nationale de crise, disponible 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, et gérée par des professionnels spécifiquement formés au stress vécu par les agriculteurs. Composez le 1-866-327-6701 pour obtenir de l’aide.

Participez à la conversation!

Pour parler, écouter ou obtenir de l’aide :

D’après un article de l’AgriSuccès par Myrna Stark Leader.